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mardi 8 mars 2011

XAVIER BERTRAND : UN VISITEUR MEDICAL QUI NE LIT TOUJOURS PAS PRESCRIRE


Xavier Bertrand est un homme politique français qui a promis de mettre de l'ordre à l'Afssaps après le scandale du Mediator. Cet homme intègre a même décidé de s'abonner à Prescrire (enfin, aux frais de la République). Et ce matin, notre Joseph Prudhomme, notre Saint-Jean Bouche d'Or, notre arbitre des élégances scientifiques, répondait aux questions de Jean-Pierre Elkabbach sur Europe 1. Interrogé sur le problème de l'IVG chez les adolescentes, il a récité son argumentaire et il nous a affirmé avec une conviction expertale digne de Roselyne Bachelot défendant la vaccination dans les gymnases que la raison principale de la non diminution des IVG était le non remboursement des pilules de troisième génération, qu'il a appelées "minidosées" (sic), et qu'il s'agissait, ce non remboursement, d'un problème de Santé Publique ! Si vous êtes incrédules vous pouvez écouter ceci ICI entre 7 minutes et 3 secondes et 8 minutes et 29 secondes. Il est vrai que la question avait été amenée par le journaliste dont personne n'ignore qu'il est un spécialiste de la brosse à reluire.

De ces propos "scientifiques" nous retiendrons :
  1. Que les experts de la contraception sont tout aussi sponsorisés que l'étaient les experts de la grippe
  2. Que les collaborateurs de Xavier Bertrand ne lisent toujours pas Prescrire.
Pour ceux qui veulent des avis éclairés sur la question, ils peuvent :
  1. S'abonner à Prescrire
  2. Lire plus modestement ce que j'écrivais sur les pilules non remboursées sur ce blog et de l'inintérêt du desogestrel : LA.
Comment faire confiance à un pareil gogo ?
Comment faire confiance à un visiteur médical qui parle de Santé Publique ?
Qui va réagir au niveau professionnel ?

PS - Je rajoute ceci le 13 mars 2011 (grâce à Jean Lamarche) : Xavier Bertrand, selon un document que je ne peux vous joindre pour des raisons d'abonnement et de confidentialité (APM international), a décidé (c'est lui qui décide de l'Agenda des Assises du Médicament ?) que la question du remboursement des pilules dites de troisième génération (c'est moi qui commente) sera mis à l'ordre du jour de ces Assises. Sidérant ! Voir le sujet des Assises du Médicament dans un autre post : ICI.

samedi 18 décembre 2010

MARQUEURS SERIQUES DE LA GROSSESSE : UNE FEMME QUI SE POSE DES QUESTIONS - HISTOIRES DE CONSULTATION : EPISODE 57


Madame A, 37 ans, revient me voir avec son test sanguin de grossesse (positif) et une échographie obstétricale de datation (ses règles sont totalement irrégulières, les cycles peuvent durer entre 28 et 84 jours) ; elle avait consulté initialement pour des nausées et des vomissements sans point d'appel évident.
Je lui délivre un calendrier automatisé que je sors de l'ordinateur et je le lui commente en détail en me disant à chaque fois que je vais trop vite. Mais je l'invite à penser à des questions qu'elle pourrait me poser lors de la prochaine consultation ou à me téléphoner avant si elle est pressée et / ou inquiète.
Je fais un peu de médecine entre deux (prendre la PA, peser, m'informer des grossesses précédentes, prescrire une prise de sang, une autre échographie, ...) mais, en général, je ne m'occupe plus des grossesses car j'en ai assez de me demander et de demander avant ou après si la femme qui est en face de moi et qui me tend son test positif (urinaire ou sanguin, remboursé ou pas) acceptera de se faire examiner par un homme...
J'adresse dont la dame à mon associée qui, vous l'avez deviné, est une femme.
(Ne croyez pas que cette attitude est liée au fait que j'exerce au Val Fourré où il existe une très forte communauté musulmane car nombre de mes confrères masculins médecins généralistes font, depuis leur installation, le suivi des grossesses sans que cela pose d'énormes problèmes et avec une grande compétence. Disons que je n'ai jamais été un grand fan de la gynécologie, et bien que je sois "sorti" de la faculté Cochin-Port-Royal-Baudeloque- St-Vincent de Paul (Paris 75014) où les obstétriciens avaient grande réputation ils ne m'ont pas laissé une impression extraordinaire et m'ont plutôt rendu méfiants à l'égard de cette spécialité -- sans compter la suite et je vous invite à vous rappeler, ici, ce que je pense de la gynéco-obstétrique)
Pour en revenir à Madame A, dont je n'ai pas précisé, mais vous avez dû remarquer que je ne précisais jamais ce genre de détails dans mes Histoires de Consultations, qu'elle était foulardée (pas voilée) et que je la connais depuis son plus jeune âge, que j'ai connu toute sa famille dont son père décédé dans des conditions affreuses, je n'ai pas le temps d'en parler ici, et qu'avec les différents mariages et déménagements je n'ai fini par ne plus voir grand monde et que Madame A revient au cabinet depuis un petite année (son mari et ses deux enfants).
Où en étais-je ?
En regardant le calendrier de grossesse Madame A semble réfléchir et elle se décide : ella a besoin d'éclaircissements sur le dépistage de la trisomie 21.
Je tente de lui expliquer l'affaire. Surtout que désormais ce n'est plus moi qui prescris mais l'échographiste au décours de la première échographie.
Elle veut en savoir plus.
Je reprends : les marqueurs sériques indiquent une probabilité qui tient compte de l'âge de la femme et qui conduisent, s'ils sont considérés comme à risques, à proposer une amniocentèse. "Est-ce que je suis obligée de la faire ? - Non. - Et c'est fiable ? - Ben, si les marqueurs sériques sont une probabilité, l'amniocentèse entraîne un caryotype qui, lui, est très certain."
Elle a l'air gênée.
"Personne ne me forcera à avorter ? - Non, bien entendu. Tu ne souhaites pas avorter ? - Non, je sais que c'est dur, vous avez connu mon frère handicapé... - Oui, A...- Il est mort maintenant, mais, ce n'est pas le problème... Dieu ne nous autorise pas à reprendre une vie... Je pense que je n'avorterai pas."
Je la regarde, elle me regarde.
Moi : "C'est un choix très difficile. - Vous savez, d'un point de vue humain, oui, élever un enfant handicapé, c'est très douloureux. D'un point de vue religieux, cela, j'en suis sûre, l'avortement est interdit. - Même pour des motifs médicaux ? - Je ne crois pas. Bien entendu je ne connais pas toutes les opinions, tous les avis des théologiens, mais je crois que la religion musulmane est claire là-dessus : il ne faut pas enlever la vie." Je ne réponds pas. J'aurai des choses à dire, les lapidations, des choses comme cela, mais cette femme me parle d'autre chose... Pourquoi irais-je l'embêter avec des on-dit ou des excès ?
"Tu sais, moi qui ne suis pas croyant, et moi qui suis sociétalement contre la peine de mort, l'avortement me pose question. Pas l'avortement thérapeutique, je suis quand même moins questionneur, là, je crois qu'il n'y a pas de problème, avoir un enfant trisomique, ce n'est pas de la tarte... mais cela pose quand même une question morale..." Elle ne fait ni l'étonnée, ni l'intéressée. "Mais il y a des gens qui pensent que la destruction des trisomiques, c'est de l'eugénisme... Pas moi... Mais je ne peux m'empêcher de poser la question... - Eugénisme ? - Pardonne-moi, cela veut dire, comment dire ? Cela veut dire supprimer tous les anormaux, les fous, les tarés, les mongoliens comme on disait auparavant, comme si tout le monde devait être normal... C'est ce que l'on a reproché à Hitler. - Mais, ce n'est peut-être pas pareil... - Comment cela ? - Eh bien, supprimer un adulte mongolien et un foetus mongolien, même quand on n'est pas croyant... ce n'est pas la même chose... - Ton argument est très fort. Mais, d'un point de vue religieux, et, encore une fois je ne suis pas religieux, c'est tout autant supprimer une vie. Tu sais, c'est pourquoi l'avortement me pose question, il s'agit d'une question de curseur, à la période romaine, quand on ne voulait pas d'un enfant, surtout une fille, on l'exposait, c'est à dire qu'on le déposait à un coin de rue jusqu'à ce qu'il meure. Et c'était accepté alors qu'on l'entendait crier et pleurer. Est-ce que cela serait accepté de nos jours ? - Bien sûr que non. - Au Moyen Age, en France, les mères pouvaient placer les enfants dans un tourniquet, le bébé à peine né était abandonné dans un mur et il était récupéré de l'autre côté par des religieuses, et la mortalité de ces enfants était considérable. Et ces tourniquets étaient installés par l'Eglise qui refusait l'avortement. - Je ne savais pas... - Eh bien, à l'époque moderne, quand les femmes ou les couples, mais la loi parle essentiellement des femmes, quand les femmes ne désirent pas un ou des enfants, elles peuvent avorter dans un cadre légal, c'est à dire se débarrasser d'un foetus pratiquement sans risques médicaux. - Mais ce n'est pas l'avortement thérapeutique, ça, c'est strictement interdit par la religion. - Tu as raison, par toutes les religions, me semble-t-il. Mais une très large majorité de Français est pour l'interruption volontaire de grossesse, c'est le nom savant ou hypocrite pour l'avortement. Au nom du droit des femmes."
Madame A sait cela. "Je ne peux pas juger pour ces femmes mais enfin, pour une musulmane comme moi, c'est choquant. - Moi aussi, je suis, un peu, choqué. Mais toutes les femmes qui se présentent dans mon cabinet et qui veulent avorter, je les fais avorter dans les meilleures conditions, je les informe des conséquences, je ne leur parle pas de mes réticences, sauf si elles abordent le sujet, je leur propose le meilleur centre et, malheureusement, dans les meilleures conditions financières, car, contrairement à ce que l'on croit, l'IVG n'est pas gratuite, même dans les centres de planning familial, les meilleures conditions médicales, afin qu'elles n'aient pas à pâtir de ce geste pour le reste de leur vie. - Donc, vous, vous êtes contre l'avortement ? - Non, je ne dirai pas cela. En tant que partisan de la vie je me pose des questions sur ce que l'on peut appeler (et ne cite pas le nom de l'auteur qui a écrit cela pour ne pas faire le pédant ou le malin, à savoir Paul Yonnet), ouvrons les guillemets, "la division de la conscience". - Qu'est-ce que vous voulez dire ? - C'est un phénomène très répandu dans l'âme humaine, c'est à dire que des gens, des sociétés, ici la société occidentale, à part l'Irlande, sont contre la peine de mort et pour l'IVG, mais il y a beaucoup d'autres domaines où existent des exceptions, et tu en trouveras facilement dans la religion musulmane, sans nul doute, divisent leur conscience : Tu ne tueras point et, pour d'excellentes raisons, Tu tueras un foetus."
Madame A semble contente de sa consultation.
Nous y reviendrons une autre fois dans un chapitre qui s'appellera "Le Choix de Sophie".


dimanche 23 décembre 2007

Avortement en France : rien de nouveau

Les laboratoires commercialisant Norlevo ® font une campagne d’information insistant sur le nombre élevé d’IVG en France (environ 200 000) et rappelant que les médecins n’en font pas assez pour informer leurs patientes sur les conduites à tenir en cas d’oubli. Certains peuvent y voir une offensive de Byg Pharma pour vendre de la contraception d’urgence mais j’y vois, moi, une formidable démission des médecins et de la société française concernant la prévention de l’IVG. J’ai bien dit : la prévention de l’IVG ! Car l’IVG, de quelque point de vue que l’on se place est un formidable gâchis ! Nous sommes pollués par deux idéologies contradictoires qui aboutissent aux mêmes effets : d’une part, les moralistes de la droite religieuse qui refusent l’information sexuelle, le développement de la contraception et stigmatisent l’avortement ; d’autre part, les moralistes de la gauche ultra féministe qui, en clamant que le corps des femmes n’appartient qu’aux femmes, que l’avortement est un droit, ont oublié la contraception en route. Car l’IVG est, de toute manière, un échec : échec de l’information sexuelle dès le plus jeune âge, échec de la contraception, échec de la pilule du lendemain chez les femmes qui prennent déjà la pilule (et qui l’oublient). N’oublions pas qu’il n’y a pas non plus que les conditions sociales qui mènent à l’avortement ; il y a aussi le désir de grossesse qui est différent du désir d’élever un enfant qui est différent du désir de pouvoir être enceinte qui est différent de celui de se sentir enceinte… Il y a aussi les conneries féministes ( ?) de la contraception masculine (l’idée que l’homme partagerait avec la femme le fardeau de la contraception) alors que la contraception féminine est, pour le coup la CONQUETE essentielle de l’indépendance et du choix absolu de la femme d’être ou de ne pas être enceinte. Quant à la responsabilité des médecins, venons-y : combien de médecins, en prescrivant pour la première fois la pilule, en prolongeant la prescription, en prescrivant un bilan lipidique, un frottis ou en palpant les seins rappellent des objectifs pédagogiques simples comme « Que faire en cas d’oubli ? Quand utiliser un préservatif sous pilule ? Quand prendre la pilule du lendemain ? » Combien de médecins continuent de prescrire des pilules non remboursées à base, notamment, de desogestrel, alors qu’il n’existe aucun intérêt en terme de contraception et des effets délétères en terme d’effets indésirables ? Pourquoi sont-ce les mieux informés (gynécologues médicaux et / ou obstétriciens) qui sont les principaux prescripteurs de ces pilules ? Mais, à leur décharge, ils avaient aussi été les prescripteurs de distilbène, de THS, alors qu’il leur suffisait d’ouvrir les yeux pour connaître les « risques » de ces produits.